Safe&wild

Previously…

Quand il arrive, sans se douter de rien après plusieurs jours loin l’un de l’autre, il comprend vite à ma mine qu’il y a un truc qui déconne.

Il me regarde, inquiet : « Ça va ??? »

« Bof », que je lui dis, vénère et ironique.

« Qu’est-ce qui se passe…??? »

Je lui demande s’il a reparlé à A. depuis nos vacances au ski.

Il me répond tout de suite que non. Je lui demande s’il est sûr. Il confirme, ajoute qu’il l’a aperçue de loin sur le parking, sans être sûr de la date antérieure ou postérieure aux vacances, mais il est presque sûr de ne même pas l’avoir croisée dans son bâtiment.

J’en peux plus de ces « presque »…

« Pourquoi ??? »

Il a l’air préoccupé mais différemment des autres fois.

Je lui raconte. Mes échanges du lundi d’avant avec A., dont je ne lui avais pas parlé, considérant que je lui dirai plus tard, ou pas. Puis la relance, la veille, le bullshit de flamme jumelle qu’on dirait tout droit sorti d’une série pour ado de mauvaise qualité, les tartines de mots mielleux.

Il m’observe, perplexe.

J’arrive à la question du jeu cruel comment-je-réagirais-si…

Il écarquille les yeux.

Je le sens bouillir de colère, en panique mais pas comme les fois d’avant. Je le vois presque commencer à gonfler, comme un Hulk.

Quand je dis qu’elle a finalement raconté n’avoir pas couché avec lui, il expire d’un coup, mais garde des yeux de fou, grands ouverts.

Suspendu à mes lèvres.

Je raconte ensuite qu’elle a répondu négativement à la question des avances qu’il lui aurait faites.

Il redescend encore d’un étage, mais semble dans une colère noire.

Je poursuis l’histoire avec la discussion qui aurait eu lieu dans l’escalier. Lui raconte tout ce qu’elle a prétendu qu’il lui a dit. Et à quel point je suis outrée. Désespérée. Épuisée.

« Écoute-moi, vraiment : je n’ai pas échangé un seul mot avec cette meuf depuis fin décembre, et encore moins depuis que tout a explosé. Et si je lui avais dit tout ça, ça serait complètement fou. »

Je lui rappelle qu’il y a plein de choses ahurissantes qu’il a faites, que je n’aurais jamais pu imaginer de lui.

Il le sait, le concède, penaud.

« J’ai fait de la merde comme jamais, et je te demande encore pardon mille fois, mais là je suis impuissant à te prouver que ça n’est pas vrai, alors que c’est archi faux : nous ne nous sommes pas reparlé, et pourquoi irais-je dire tout ça ??! Alors que je n’en pense absolument rien ?? Regarde, j’ai même commencé à raconter ce que j’avais fait à mes amis proches, pour la première fois de ma vie. Je t’ai dit que je voulais en parler à ma mère et à mes fils, c’est prévu : je fais tout ce que je peux pour remettre de la transparence dans notre vie, et assumer tout ça. Je comprends que tu n’aies plus aucune confiance en moi, et je le mérite, mais je le jure sur la tête de la terre entière : je n’ai pas échangé un seul mot avec A. depuis fin décembre. Je te le promets. »

Il fulmine. Sa rage et ses yeux paniqués me le rendent crédible.

Je sais que j’ai déjà dit ça au tout début de cette histoire alors que j’étais en train de me faire laaaaaaargement rouler dans la farine comme un bleu-bite – et je suis tétanisée, le mot est faible, à l’idée d’être à ce point reprise pour une conne un jour –, mais là ça sonne vraiment plus viscéral.

Et c’est vrai, le fait qu’il s’ouvre enfin sur une partie de sa face cachée à ses plus proches me rassure beaucoup. C’est une première et il était temps qu’il s’y autorise. Qu’il se montre tel qu’il est, avec ses forces mais aussi ses failles. Qu’il cherche à se colmater, à ne faire plus qu’un.

« Mais alors explique-moi pourquoi elle me dit ça, cette fois-ci ??!
– Je ne sais pas, R. Je ne sais pas et ça me fout les boules.
– Et moi donc…
– Je ne suis pas dans sa tête de tarée, mais ce que j’en pense, c’est qu’elle n’a pas réussi à m’avoir autant qu’elle le voulait, elle n’a pas réussi à te pécho… alors le seul truc qui lui reste, c’est de détruire notre couple.
– Mais ça serait dingue ! Horrible !! Contraire à tout ce qu’elle m’a dit ! Je n’en reviens pas…
– Crois-moi, cette meuf est siphonnée, et très forte pour créer du malaise. C’est ce qu’elle est en train de faire…
– Je vais finir par demander cette confrontation à trois…
– Si tu le souhaites, on le fera. Même si je pense personnellement que ça n’apportera pas forcément du bon vu de qui on parle. Mais quoi que tu décides, je te suis. »

Je lui réponds que je suis tiraillée sur ce point. Je sais que ça ne m’apportera pas toutes les réponses à mes millions de points d’interrogation. On peut toujours mythonner, même devant deux personnes. Surtout quand il y a un tel enjeu.

Par contre ça empêche le mytho – les mythos, devrais-je dire – de donner deux versions différentes sur un même fait. Et ça permet d’observer des réactions physiques, aussi.

Et puis ça me donnerait une idée de la façon dont ils échangent, suite à tout ce merdier, puisqu’après tout, à part quelques photos où la meuf est floutée et collée love-to-love à mon mec qui semble avoir 22 ans tant il est filtré (par elle), je ne les ai jamais vus ensemble.

C’est pas tant que ça manque au petit musée des horreurs qui s’est créé dans ma tête mi-janvier, non. Vraiment pas. Il est déjà bien trop chargé.

Mais là ça serait une scène où ils ne sont pas en train de faire ce qu’ils font dans les autres images qui me hantent. Là ça serait probablement plus une explication musclée.

Et puis j’aurais peut-être moins l’impression d’être une mouche qui se noie, abandonnée dans du vinaigre. J’aurais moins l’impression d’être seule face à des forces occultes.

Bref… je ne suis toujours pas très au clair sur mon besoin de confrontation finale.

Par contre je lui annonce que je le crois plutôt sur l’histoire de la – fausse – discussion dans l’escalier.

En espérant ne pas être une fois de plus une grosse bouffonne.

Il me jure que non.

Nous nous serrons dans les bras l’un de l’autre…

Je le répète, c’est le plan qu’elle m’a fait avant de me parler de l’escalier qui lui a fait perdre toute crédibilité.

Je ne dis pas que tout ce qu’elle m’a dit est faux.

J’ai bien trop de preuves pour l’imaginer ne serait-ce qu’une seconde, malheureusement.

Mais ça ouvre l’hypothèse d’un récit dont on aurait plus ou moins, et peut-être plus que moins, façonné les contours.

Enfin je te dis que je le crois sur ce coup-là, mais la vérité c’est que cet ultime épisode – au moment où je t’écris en tous les cas, puisque je n’ai pas reparlé à A. – a pulvérisé mon début de guérison.

Nous avions bien avancé, mon mec et moi, et à nouveau, le serpent venimeux…

Le. Putain. De. Doute.

Parce que si ce plan là est encore un mytho, il n’y a plus rien à sauver dans mon couple.

Absolument plus rien, makash, wallou.

Alors je m’accroche à la falaise et je crois mon mec.

Les jours, les semaines qui suivent, même si j’arrive à gérer mes journées et mes nuits pas si pire au regard de la merde que je me prends dans la gueule depuis trois mois, je dégoupille régulièrement.

Sous diverses formes.

Larmes froides, sanglots orgasmés, sombre ironie, paranoïa aiguë, grosse vénère, sur les uns et les autres, colère qui ronge, dégoût terrifié, envie de cogner.

Oui. Envie de cogner. Souvent.

Alors parfois c’est moi que je cogne, pour secouer mon ciboulot et en virer les idées trop noires.

Encore régulièrement je suis saisie d’effroi et les imagine comme deux diaboliques qui continueraient à rire de ma crédulité tout en s’envoyant en l’air de l’autre côté du périph’…

Je lutte contre moi-même, et ça me coûte beaucoup d’énergie.

Et puis il y a cette histoire de routine…

Bordel de merde, à bien y réfléchir, elle ne vient pas particulièrement de moi.

Certes c’est lui qui me tartine de mots de désir H24 – même quand il me trompe éhontément, ce qui leur donne soudainement beaucoup moins de crédit –, d’ailleurs je l’en remercie – les mots crus, pas la trahison ni le bullshit – ; certes je ne le suçais plus assez total mea culpa tout ça tout ça ; certes je me contentais parfaitement de mes jolies culottes noires et de notre sexualité simple et funky, mais…

Moi aussi je lui exprime mon désir très souvent. Et il est arrivé plusieurs fois que j’amorce un mouvement vers lui pour du sexe un peu décalé, et qu’il le réoriente, lui, vers du sexe routinier.

Je n’ai pas souvenir que l’inverse soit beaucoup arrivé…

Les derniers mois, d’ailleurs, quand la demi-molle s’est invitée dans notre lit, j’avais constamment l’impression d’être celle, une fois dedans, qui allait vers lui. Je le trouvais attentiste.

Pareil pour la pipe. C’est vrai je suis une sale feignasse, une sale toxico du soir, mais, déjà, il ne me lèche pas plus que je ne le suce (et ça ne me pose aucun problème, d’autant moins qu’il ne le fait pas vraiment comme moi j’aime, et que je n’ai pas ressenti le besoin de lui délivrer une masterclass pour qu’il sache me faire monter ainsi) et, en plus, il est arrivé plusieurs fois que je commence une fellation et qu’il m’en détourne assez vite.

Pour me faire l’amour !

Donc je me disais simplement qu’il préférait le coït, comme moi.

Idéal.

Bref… désormais je ne suis pas sereine sur le sujet.

On baise beaucoup, forcément.

Pas du tout en mode routinier. Tu t’en doutes.

Je déploie tout. Les photos, les dessous, les pratiques…

J’offre ma peau la plus sensible.

Et je ne parle pas (que) de mon cul. Mais bien de mon cou, cet espace hyper intime et secret que je n’ouvre presque jamais.

Je me fais tatouer. Gentle reminder bien placé. Une phrase gravée sur la bague que je lui avais offerte lors de notre première année. En ajoutant une parenthèse.

Une parenthèse capitale.

Car moi aussi je veux être sauvage. Sauvage mais protégée. Protégée mais sauvage.

Car bizarrement, j’ai presque encore plus peur de la routine quand elle est à son initiative.

Je sais pourtant que c’est une très bonne chose. Que nous ne pourrons pas tenir un tel rythme ad vitam aeternam. Je lui dis, d’ailleurs. « Profitons-en tant que mon cerveau est en mode panique. Quand il va guérir ça va se calmer un peu… »

Je panique tellement qu’un mardi après-midi, après avoir fait l’amour avec lui – une baise parfaitement chouette mais… normale –, je lui rappelle violemment que ça n’est pas moi qui ai installé la routine entre nous, mais bien lui autant que moi. Et qu’il serait bien avisé de ne pas réitérer sauf à être capable, cette fois, de ne pas aller chercher le piment ailleurs.

Et même de ne pas l’accepter aussi facilement, aussi largement, aussi irrespectueusement en me laissant sur le bas-côté de la route.

Je lui liste, vénère, tout ce que j’ai fait depuis le début du merdier, tout ce que j’ai changé. Et lui demande ce qu’il a fait, lui, de son côté, pour ne pas retomber dans le quotidien sexuel qui a semblé lui déplaire.

Pas grand chose.

À part rebander.

Ce qui n’est pas rien, surtout dans mon référentiel.

Mais ça n’est pas un effort.

Je crie, je pleure, je fous un coup de pied dans une porte, je marche erratiquement comme une folle furieuse.

Je me sens totalement impuissante et forcément condamnée.

Condamnée à revivre ça un jour. Condamnée à ne pas savoir comment l’éviter.

En larme, en furie, je le frappe, martèle son torse – enfin ! –, je shoote dans un tabouret, faisant voler dans la foulée un vase posé sur mon piano.

Il cherche à me calmer, à m’enserrer, à me contenir…

Et moi je finis par lâcher… Je m’arrête, essoufflée.

Rompue.

Je crois que j’avais besoin d’exploser.

Physiquement.

Jusqu’à présent je n’avais qu’implosé.

À suivre…

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2 commentaires pour Safe&wild

  1. Gawel dit :

    une confrontation… (smiley aux yeux grands ouverts inquiets) Ouh que (de ce côté de l’écran) ça semble risqué avec une meuf pernicieuse… prompte à créer de nouveaux doutes, de nouvelles images…

    Protège toi, Pas Toujours Si Douce Et Tant Mieux !

    Vivent les pipes interrompues, vivent les baises chouettes, normales ou pas, vive le désir mutuel…

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